8 mai : Il faut avancer !

C’est décidé, j’irai jusqu’au bout ! J’ai envie d’en finir, mais le temps ne passe pas. Je constate qu’arriver au Km150 devient compliqué. Une fois cette distance passée, ça va mieux, mais pfui, il faut y arriver ! La journée est rythmée par des petites siestes, car je commence à fatiguer plus vite.

Je rencontre encore plusieurs dotwatchers sur la route. L’un d’entre eux me dit que c’est la pire météo qu’il y ait jamais eu sur une RATN. Ha bah sympa, mais il ne fallait pas faire ça juste pour moi ! Un autre roule une bonne demi-heure avec moi et ça me booste bien. C’est toujours aussi surprenant de voir un(e) inconnu(e) vous attendre sur le bord de la route, mais c’est bon pour le moral.

La météo est de nouveau un peu moins bonne, mais pas aussi horrible qu’avant, donc je ne fais même plus attention à la pluie et au vent.

Comme la veille, le matin je suis pleine de motivation mais après 14h, ça devient compliqué. Je ne sais pas comment font certains pour arriver encore à se relancer après 20h et un bon repas dans le ventre.

Je clôture la journée au camping de Borkel avec 195 km dans les jambes. Je n’arrive pas à faire du camping sauvage, j’ai trop peur. J’ai besoin du cadre rassurant du camping. Je décide de me lever tôt le lendemain et de rouler aussi longtemps que je peux. Chaque kilomètre me rapproche de l’arrivée ! Et Armin a dit qu’il viendra rouler avec moi, donc j’aurai de la compagnie.

Malgré la journée moyenne, j’ai quand même réussi à faire quelque chose de dingue sans m’en rendre compte : me mettre dans une bulle et juste rouler. Je sais que j’ai lancé la playlist U2 et que j’ai écouté la musique. Mes jambes ont pédalé et puis d’un coup, trois heures étaient passées !!!! Je pense que mon esprit était tellement fatigué que simplement écouter les paroles l’a déconnecté du reste. Un œil sur le GPS et les oreilles dans U2. Je me dis que ce serait cool d’arriver à refaire ça.

9 mai : le réveil qui pique

Pour pouvoir avancer plus vite, je raccourcis ma nuit. Je mets mes premiers coups de pédale à 4h30. Inutile de vous dire que je baille tout en roulant. Par contre, ce n’est pas tout à fait judicieux de le faire ce jour-ci, car je suis dans la déviation prévue par la RATN qui passe dans des chemins de terre. En effet, au moment de la course, les passages de frontières étaient réglementés et pour éviter tout souci, les organisateurs avaient modifié le trajet pour rester aux Pays-Bas. Mais du coup, on passait dans une forêt avec des chemins de qualité moyenne. Et moi, j’ai choisi ce jour-là pour commencer dans le noir … J’arrive à m’en sortir au son des crapauds et autres animaux, mais c’est moyen. Par contre, j’ai droit à un magnifique lever de soleil que je savoure.

Mon premier lever de soleil lors d’une course d’ultracyclisme !

A 7h42 du matin, j’ai déjà parcouru 39 km, mais ça me parait compliqué de faire 200 km sur la journée en sachant que tout le dénivelé doit encore arriver. Bon, il faut que je me décide. J’ai envie de finir, mais pas au point de m’endormir sur le vélo et de risquer un accident. Je prends contact avec l’organisateur pour savoir si la page de suivi en ligne reste visible même si je finis un jour plus tard. La réponse est oui. Je sais alors qu’il n’y a pas de souci pour rassurer la famille et les amis et ainsi je fais la paix avec moi-même. Je ne serai pas à Amerongen ce dimanche soir, mais je finirai le trajet. Il y a du soleil et moins de vent, donc ça va mieux.

De plus, Armin me rejoint peu après Valkenburg et nous faisons à deux les 45-50 kilomètres les plus pénibles de tout le trajet. La côte à 22% pique les jambes, même en poussant le vélo ! On tombe encore sur un dotwatcher au hasard d’une montée ce qui nous motive aussi. Depuis, j’ai appris que ce dotwatcher est même inscrit à la RATN 2022 !

Armin me quitte à Heerlen. Je passe encore trois montées chiantes et un passage assez bizarre du côté de la base OTAN avant de m’arrêter. Je vois un panneau qui indique un hôtel, alors je vais par là. Heureusement, il y a beaucoup de chambres libres et la gentille dame de la réception m’installe même à côté de celle près de la grande salle pour que j’aie accès à mon vélo et que je puisse partir tôt le lendemain matin sans déranger personne.

Je constate ce soir-là que j’ai réussi à attraper des coups de soleil aux poignets, alors que quatre jours avant j’étais dans la tempête…

Je fais appel à mon frangin pour qu’il vienne me chercher en voiture à Amerongen le lendemain soir pour ne pas devoir rentrer en train. C’est ma dernière nuit à l’hôtel et j’ai quand même hâte de retrouver mon lit.

Je visais 200km ce jour-là ; j’en ai fait 178. Pas mal.

La montée de trop pour ce jour-là.
Spotée par un dotwatcher

10 mai : c’est enfin le dernier jour !

Le réveil est moins difficile. Je me sens légère, mais j’ai encore 195 km à faire. Ce n’est pas rien. J’entame la journée par une longue montée qui s’avère être la dernière. Ah, si j’avais su, j’aurais peut-être poussé un peu la veille, mais ce qui est fait est fait, il ne faut pas regretter. À partir de maintenant, c’est en pente douce jusqu’à Amerongen. Les quarante premiers kilomètres sont mêmes en pente douce assez forte, car je roule vite. J’ai une moyenne de quasi 20 km/h. Je découvre un Plus (supermarché) sur ma route, donc c’est fiesta au petit déjeuner ! Il fait déjà plus chaud que les autres jours à la même heure et le vent est très léger. Je suis bien boostée !

Malheureusement, je ne tarde pas à sentir le fait de rouler plus vite : mes cuisses commencent à tirer. J’essaie alors de ralentir l’allure, mais je n’y parviens pas vraiment tellement la pente douce m’emporte. Je me dis « tant pis, laisse-toi aller, tu arriveras plus vite. »

À midi, je tombe sur un McDonald’s. Cool, un repas chaud vite préparé et des toilettes ! Le reste de la journée se passe tranquillement et je n’ai pas beaucoup de souvenirs, si ce n’est que j’ai vu deux Bullitt à Nimègue et qu’à 35 km de la fin, j’ai fait une pause pour ranger le vélo et le rendre présentable.

Par contre, j’ai la chance de ne pas finir seule : je suis à 10 km de la fin environ et j’attends à un feu rouge quand j’entends qu’on me parle en néerlandais. Je ne comprends rien, si ce n’est le « Race Around the Netherlands ». Je me retourne et le gars comprend que je bugue, alors il répète en anglais. Je comprends qu’il me demande si je fais la RATN. « I’m the proud last one » est ma réponse, et là, le mec se transforme en groupie ! Il sait qui je suis et me demande s’il peut rouler avec moi car, il habite la rue du Proloog. Sans problème ! On passe donc les dix derniers kilomètres en papotant. Il va être sur le c*** de voir que je roule avec un vieux vélo, en baskets et avec tout mon brol ^^ Il me demande même de faire un selfie ensemble pendant qu’on roule. Là, je me rends compte qu’il y a visiblement pas mal de monde qui me suit encore même si la course est finie. À la fin, il  s’écarte pour me laisser passer l’entrée du Proloog et applaudit.

Mon cœur déborde de joie : JE L’AI FAIT !

Le patron du Proloog est là et me donne le cadeau du finisher : une superbe carte. Il me prend en photo et prévient les organisateurs que j’ai fini. JE L’AI FAIT BORDEL !!!! Je discute encore un peu avec les deux gars, puis ils me laissent. Mon frère ne va pas tarder. J’en profite pour faire une dernière vidéo et couper le traqueur. J’ai droit à un magnifique coucher de soleil.

Je manque de pleurer en voyant mon frère. C’est tellement surréaliste de le voir après tout ce temps passé sur le vélo. Il m’a amené des crasses à manger mais je n’ai pas faim. On charge le vélo et puis on se met en route pour Bruxelles. Il me pose plein de questions et je parle, je parle, je parle. Je parle tellement que d’un coup, on est sur le ring d’Anvers. Il me dépose à la maison aux environs de 0h15. Je ne suis pas fatiguée, mais j’ai envie de m’allonger. Mon cerveau se coupe et je m’endors sans m’en rendre compte.

Je suis finisher RATN 2021 en 10 jours 13h et 23 minutes.

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