Après vous avoir parlé de ma préparation à la Race Around The Netherlands (RATN), je vous propose aujourd’hui de rentrer dans le vif du sujet : l’épreuve en elle-même. Je rédige ces notes bien des mois après avoir parcouru les routes néerlandaises et je sais que j’ai oublié certaines choses. Mais, grâce à la magnifique technologie dont nous sommes dotés aujourd’hui, j’ai pu noter une foule d’informations pendant que je pédalais. Par ailleurs, Twitter m’a permis de laisser de belles traces en ligne et je possède aussi toutes les notes vocales que j’ai envoyées à mon compagnon. C’est d’ailleurs assez perturbant d’entendre sa voix enregistrée. On y entend bien dans que j’étais toujours pleine de motivation l’avant-midi (la matinée pour les non belges ^^) puis ça se compliquait et on entend bien ça dans ma voix.
Globalement, j’ai envie de dire que ça a été. Oui, je sais que j’ai vécu des moments difficiles et j’ai aussi craqué, mais dans ma tête, actuellement j’ai de beaux et bons souvenirs et j’ai déjà hâte d’être en mai 2022. Je suis persuadée que je pourrai faire mieux l’année prochaine et j’ai envie de faire mieux, donc je ferai tout pour y arriver. J’ai hâte de voir les comparatifs que Strava va produire entre les deux trajets. J’ai aussi hâte de participer à la course avec MON vélo équipé comme je veux. Bref, vous l’aurez compris, j’ai pris goût à la RATN ^^
Jour J-1, jeudi 29 avril 2021
Mon périple commence la veille de la course. En écoutant les infos le matin, j’entends qu’il y a une grève sur le réseau ferroviaire néerlandais… Ha. Je décide alors d’aller jusqu’à la frontière en train et de terminer le trajet à vélo. Voilà 100 km faits avant même d’avoir commencé la course. Avec le recul, je ne le recommande pas du tout. Il valait mieux que j’aille perdre du temps dans les transports en commun que de rouler aussi longtemps dans une météo déjà pas top. Par contre, passer la nuit sous tente la veille de la compétition, je n’aurais pas pu y échapper, vu que le logement prévu par l’organisation a été annulé (merci le COVID-19). Mais je ne la recommande pas non plus. Bon, en plus de ça, la grève chez la NS s’est diluée au fur et à mesure que j’atteignais la frontière. Mais il n’était plus possible de changer de trajet, car il n’y a pas de lignes de trains qui vont par où je passais. J’aurais dû retourner vers Utrecht avant de devoir quand même finir à vélo.
Je roule donc vers Eck en Wil sous un ciel gris et parfois avec quelques gouttes. Un vent de trois quarts face s’invite au fur et à mesure de la journée. La météo me dit que ça va durer deux jours, puis s’améliorer … Elle s’est bien loupée, la météo, là ! Je fais ces cent premiers kilomètres à mon aise et arrive en début de soirée au camping. Je me souviens avoir vu une pompe à essence « Auto Food » qui m’avait bien fait rire et aussi une petite statue de la liberté, mais je suis incapable de les situer sur une carte. Il me restait ensuite vingt minutes de vélo à faire pour atteindre Amerongen.
Je monte alors la tente sous une petite pluie fine qui s’arrête puis reprend de plus belle pendant la nuit. Fun fact : le propriétaire du camping connait la course et me dit qu’il me suivra. Il m’offre aussi une pomme, un œuf dur et un ticket pour le bac du lendemain. Ça fait plaisir et ça met de bonne humeur.
Le jour en chiffres : 100,2km en 5h10
Activité Strava et fil Twitter du jour.
Enfin le Jour J ! , vendredi 30 avril 2021
À cause du COVID-19, il n’y a pas de départ en masse et chaque participant(e) a dû choisi un créneau. J’ai demandé celui de 6h30-6h45. Le bac ouvre à 6h du matin, donc c’est nickel. Je me lève à 5h et je remballe la tente humide (mais pas sous la pluie). J’ai dormi cinq heures. Il me semble que ça fera l’affaire. Je n’ai pas eu froid, c’est déjà ça. Je suis bien réveillée, je stresse. J’arrive à Amerongen et trouve le départ facilement. L’ambiance est bizarre. On reçoit notre traqueur, la gâpette, on fait la photo officielle … Et c’est tout. « Off you go », comme disait Mickael. Ça n’aide pas à calmer mon stress. Je me mets en route et ça commence avec un peu de dénivelé, mais rien de bien méchant, nous sommes aux Pays-Bas après tout. En 4h de route, je me fais dépasser par une paire et quatre riders solo.
J’arrive très vite dans le Flevoland, près d’une « petite rivière » comme je dis. Ça doit quand même faire 50m de large, je ne vois pas l’autre rive en permanence. Je subis une énorme attaque de mouches bizarres qui font beaucoup « poc poc » sur le casque et se glissent entre la chasuble et la veste. Je pousse fort sur mes pédales et je maintiens un bon 22 km/h de moyenne pendant 45 km, puis je me dis que je fais tout l’inverse de ce que j’avais dit que je ferais : rouler à mon rythme. Je me remets alors à mon rythme normal (17-18 km/h de moyenne), car ça ne sert à rien de se cramer dès le premier jour. À 11h, j’ai déjà fait 80 km. Je suis contente. Par contre, les digues c’est sympa, mais pour faire les pauses pipi, il n’y a rien pour se cacher. Je trouve une pompe à essence à Elburg qui me fournit un double combo : toilette et petit burger chaud. Sauf que c’est un burger dont la viande ressemble à celle d’une croquette de crevettes … ça surprend. Je me ravitaille aussi en chips au sel et en coca pour plus tard. J’arrive à garder le rythme que je m’étais imposé pour manger et boire : au moins un snack et trois gorgées d’eau toute les quarante minutes. C’est qu’il va falloir mettre du jus dans la machine pendant dix jours !
La claque du jour sera la découverte du Hoge Veluwe Park.
Moi
La claque du jour, c’est la découverte du parc national De Hoge Veluwe. C’est comme en Campine belge, sauf qu’au moment de la course je ne connais pas la Campine, et ces paysages de désert au milieu de forêt m’en mettent plein les yeux. Je suis sous le charme. Bon, la grosse côte qui suit après 150 km me mets dans le rouge et me fout un coup au moral. Heureusement, j’en prends encore plein les yeux : j’arrive en haut et je me crois dans un album du Scrameustache. Un milkshake impromptu après la descente me remonte le moral et une frite m’aide à redémarrer. La pluie s’invite ensuite alors que je passe Arnhem . De mémoire, il pleut pendant une heure et pas si fort que ça, donc ça va en fait. J’ai ce souvenir de rouler sur la piste cyclable sous les arbres puis d’arriver au camping, mais il y a 75 km entre les deux… Je visais un camping après 230 km, mais j’en trouve un avant celui-là. J’ai 227 km au compteur. Je me dis que c’est bien pour ce premier jour et je déballe la tente humide. Sa petite taille plus le vélo chargé et le fait que je dis partir à 6h du matin attire la curiosité de la propriétaire. Elle ne parle pas anglais, alors j’emploie mon plus beau néerlandais pour expliquer ce que je fais. Elle est impressionnée. Lorsqu’elle reviens avec les papiers, elle me dit que son mari propose que je loge dans la serre. Évidemment, je ne suis pas contre, même si la petite cahutte près de laquelle je suis est déjà bien. Je ne regrette pas d’avoir accepté leur proposition quand il drache à fond à 22h30.
Je ferme les yeux satisfaite de cette première journée, même si je n’ai pas parcouru tous les kilomètres que je voulais faire.
Le jour en chiffres : 227,61 km en 12h01
Activité Strava et fil Twitter du jour.
Et on recommence, samedi 1er mai 2021
J’ouvre les yeux à 5h du matin avec le bruit de la pluie qui tape sur le toit. Génial … Mais au moins, presque toute la tente est sèche et je sais que ce soir je ne m’endormirai pas dans une atmosphère mouillée. J’ai dormi sept heures, je me sens revigorée. Et, coup de bol, la pluie s’arrête au moment où je démarre. J’ai une grosse ville à passer dès les premiers kilomètres. Et là, je suis contente de ne pas avoir poussé plus loin la veille : il y a des travaux monstrueux et je dois suivre une longue déviation. J’aurais détesté faire ça à la tombée de la nuit. Par contre, il est trop tôt pour avoir quelque chose à manger. Je pense donc à faire plus attention à avoir quelque chose de consistant pour le matin, car juste des barres de céréales c’est moyen.
J’avance bien : à 10h35, j’ai déjà fait 76 km. Il y a un léger vent de face mais rien de bien ennuyant. Les routes sont en parfait état et je m’y habitue, alors dès qu’il y a un peu de revêtement abimé, je peste. Sauf que chez nous, la route abimée, on serait déjà contents de l’avoir. On peut vite avoir de nouveaux standards quand on a de la qualité. ^^
J’arrive à me ravitailler et je craque pour un sachet de boulettes de viande dont la moitié disparaît quasiment aussi tôt. XD Pour le goûter, je demande un pain de viande chaud et des viennoiseries. J’attends qu’ils réchauffent le pain pour découvrir après cinq minutes qu’en fait il n’est pas chaud du tout … Encore heureux que les viennoiseries sont bonnes. Vers 13h30, je veux faire une petite sieste sur le bord de la route, mais une cycliste couchée dans l’herbe, ça attire l’attention… Je n’arrive qu’à dormir vingt-cinq minutes entre deux interruptions.
Vers 16h, je trouve une autre pompe à essence et j’en profite pour obtenir de quoi manger jusqu’au soir. Il me reste 80 km pour atteindre ma ville étape du jour et je décide d’enchaîner. Alors que je quitte la pompe, je vois arriver un cycliste avec une gâpette de la RATN qui me dépasse. Je le dépasse à mon tour alors qu’il remet ses chaussures. Il essaye de me dépasser à nouveau un peu plus loin, mais comme je ne maîtrise pas encore bien les prolongateurs, je manque de le renverser. On se met ensuite à papoter et on commence à baragouiner en néerlandais avant de se rendre compte que nous sommes deux belges francophones … Il tilte direct en entendant mon nom, et là, il me dit qu’il est le fils d’une dame avec qui j’ai fait Dynamobile … Que le monde est petit ! On roule vingt bornes à deux, même si je lui dis de me lâcher, car je n’avance pas vite. Il me dit que c’est bien pour lui aussi de rouler moins vite, car il a déjà mal aux tendons. Au fil de nos discussions, il va m’apprendre qu’on a un jour en plus que ce que je pensais pour faire la RATN, car on a beau avoir des départs différés, on a tous le même jour d’arrivée. Ce qui fait que moi, j’ai un jour en plus. Comment ai-je pu zapper cette info ?!!! C’est une bonne nouvelle, mais je me demande quand même comment ça se fait que je ne l’avais pas compris.
Au matin, j’avais changé l’inclinaison de la selle, car elle ne convenait pas pour quand je suis sur les prolongateurs, et je me rends compte qu’en fait elle bouge. La vis ne serre plus et je dois la serrer plusieurs fois sur la journée. Pas de chance, nous sommes le 1er mai donc tout est fermé. Je fais un assemblage de colsons, mais ça ne tient pas non plus. J’espère trouver un magasin de vélo ouvert le lundi pour m’aider, mais je commence à douter.
Je finis la journée au camping de Bourtange et je dors de nouveau sous une fine pluie intermittente. Je sens le froid qui arrive là où ma hanche touche la toile de la tente. Pas de double toit, donc je suis directement sous la pluie. C’est la limite de mon bivy.
C’est aussi la journée où je commence à rencontrer des travaux qui ajoutent des kilomètres à mon parcours : déjà sept kilomètres supplémentaires. J’espère que ça ne va pas durer, parce que bon, on a déjà assez de kilomètres à faire, donc ces cinq-six kilomètres par-ci par-là en plus, je m’en passerais bien.
J’ai de nouveau fait moins de kilomètres que ce que j’espérais, mais tant pis. Je me dis que je dois juste finir dans les temps. Mais la météo des prochains jours va en décider autrement…
Le jour en chiffres : 214,63 km en 11h39
Activité Strava et fil Twitter du jour.