Un peu plus de cinq mois après la fin de ma North Cape 4000, je reviens par écrit sur cette épopée vélocipédique.
Pour rappel, il y a un voyage Polarsteps qui vous permet de retracer mon parcours sur une carte, le tout agrémenté de photos.
Aller à Turin.
Avant même de démarrer l’aventure, il a fallu que je me rende à Turin avec mon vélo. Depuis Bruxelles, c’est assez facile : il n’y a que deux TGV à prendre et cela se fait en une petite journée de transport. Le gros problème, c’est qu’il faut démonter son destrier et prendre une correspondance à Paris en changeant de gare… Je suis donc arrivée bien en avance à Bruxelles-Midi afin de démonter mon vélo pour constater que les garde-boue empêchaient que tout le vélo rentre dans la housse… Misère ! Tant pis, j’ai alors porté la housse avec le guidon qui dépasse. Étant assez en avance, j’ai quand même pu choisir l’endroit où déposer mon vélo avec mes sacs et garder le tout à l’œil le temps que les autres passagers chargent leurs valises. Avoir mon frère et Delphine à la gare avec moi m’a aidée à diminuer le stress. Étant assez prudente et connaissant assez bien les compagnies ferroviaires, j’avais prévu 4 heures de marge de manœuvre à Paris pour faire le transfert. Et j’ai bien fait, car nous avons quitté Bruxelles avec plus d’une demi-heure de retard suite à un train venant des Pays-Bas en retard. Il a eu en plus un autre retard sur la ligne en chemin, donc nous sommes arrivés à Paris avec plus d’une heure de retard. Je savais que j’avais largement le temps de changer de gare sans devoir courir et j’étais bien contente. À Paris, j’ai découvert l’enfer du RER avec un vélo démonté dans une housse portée sur l’épaule et des sacs sur le dos. Au final, je suis arrivée à la deuxième gare et je n’ai dû attendre que 45 ou 50 minutes, au lieu des 3h prévues à la base. Lors de l’embarquement pour Turin, j’ai croisé des cyclistes avec des boîtes en carton. Cela sentait le vélo emballé pour un trajet en avion ça ! L’agent SNCF leur a dit qu’ils ne pouvaient pas rentrer avec ce genre de carton dans le TGV, car ils sont trop grands. En me voyant passer, il m’a montrée du doigt en leur disant que « ça c’est la bonne taille ». Étant donné que j’ai revu les gars à Turin, je suppose qu’ils ont réussi à négocier et mis leurs cartons dans le train. Arriver à Turin signifie aussi que c’est la première fois que j’étais en Italie ! Les 6h de train sont passés assez rapidement, mais la dernière heure a été un peu longue. Une fois remontée des profondeurs de la gare, je me suis installée dans un coin pour remonter le biclou. Le toit du bâtiment étant une immense verrière qui fait un très bel effet de serre avec le soleil, me voilà déjà occupée de suer à grosses gouttes sans avoir mis un seul coup de pédale. Les policiers présents sur place m’ont observée au début mais ne sont pas venus me parler. Une fois toutes les pièces remises en place, je me suis mise en route pour l’hôtel.
Mon chemin vers l’hôtel était assez court et j’ai découvert de belles pistes cyclables qui en mettent plein les yeux. Italie, je t’aime déjà ! J’ai été encore plus aux anges quand le personnel de l’hôtel m’a suggéré de monter mon vélo dans la chambre et quand j’ai découvert que celle-ci était trois fois plus grande que ce à quoi je m’attendais. Mon installation s’est bien passée et j’ai trouvé une pizzéria pour mon premier repas italien.
Avant la course
En raison des horaires de train, je suis arrivée 24 heures en avance à Turin. Ce qui était parfait pour visiter la ville et s’occuper du vélo en cas de soucis au remontage. Lors de celui-ci, tout s’est bien remis en place et j’ai juste dû chipoter avec le câble du dérailleur. En roulant vers l’hôtel, puis le lendemain, j’ai réalisé que les vitesses 4-5-6 ne passaient plus aussi bien qu’avant. Rien de bien dérangeant, mais je suis allée au Décathlon pour faire régler cela. Hors de question de partir 4000 km avec un réglage « presque bien ». Le vélo devait être parfait ! Ma visite de Turin fut ponctuée d’averses plus ou moins intenses. Je me suis réfugiée autant que possible au sec afin de ne pas déjà finir trempée. J’ai aussi profité de mon temps libre pour renvoyer par la poste ma housse de vélo et les affaires du voyage aller. N’hésitez pas à lire cette rocambolesque aventure dans le polarstep !
Le départ de la course se trouvait à Venaria Reale, un peu au nord de Turin, à 50 minutes de mon hôtel. En milieu d’après-midi, je me suis donc mise en route pour le briefing et la récupération de la balise et autre goodies. Sur le chemin, J’ai mangé mon premier McDonald de l’aventure. . À mon arrivée à Venaria Reale, j’étaisétonnée de voir quelque chose de complètement opposé à la RATN : des sponsors étaient présents avec des stands et un bar, on nous a donné un traqueur avec la carte des CP et numéro et puis… voilà. Personne n’a dit où installer la plaquette de course avec le numéro. Pour le traqueur, on nous a dit d’attendre le briefing. Du coup, on s’est tous regardés un peu en coin pour voir où chacun installe son numéro. J’ai discuté avec quelques français et puis il y a eu le briefing en italien et en anglais. Les 15 premières minutes étaient juste des remerciements aux sponsors et aux politiques locaux, qui y vont aussi de leur petits mots. Mouais ok. Puis, enfin, on est entré dans le vif du sujet ! Quoique, les organisateurs n’ont fait que répéter ce qu’il y avait dans les documents déjà reçus… Je me suis demandée à quoi ça servait et je n’étais pas la seule vu comment mes voisins papotaient. Ok, cela a donné l’occasion aux organisateurs de dire qu’ils ont transmis les consignes et de se déresponsabiliser en cas de souci, mais on aurait très bien pu s’en passer. Bon, quand on voit comment certains participants se sont comportés, répéter les choses, ce n’était pas superflu… Mais j’ai quand même eu l’impression que cela ne servait à rien.
Ensuite, en revenant à l’hôtel, j’ai fait les premières courses du voyage.
Le départ
Fatalement, je me suis réveillée beaucoup trop tôt le jour du départ. Bien que n’étant pas stressée la veille, j’ai eu une pointe d’appréhension en prenant mon petit-déjeuner. Malgré les 50 minutes de trajet, j’étais une heure en avance au départ ! C’est vous dire si le stress monte en flèche d’un coup ! Mais je n’étais pas la seule… Il y avait déjà une dizaine de comparses cyclistes sur place occupés à siroter du café. J’en ai profité pour regarder les setups des gens. J’ai alors réalise que j’étais loin d’être la seule à être « aussi chargée ». Nous devons être une bonne dizaine à « avoir ce qu’il ne faut pas sur le vélo ». Cela m’a fait sourire et je les ai pris en photo en me disant : « Tu n’es pas seule ». Lors du briefing la veille, il n’y avait eu aucun contrôle des vélos, mais on nous avait annoncé un check des lampes lors du départ. Nous devions tous les placer visiblement sur le vélo afin que les organisateurs puissent les vérifier. Au fur et à mesure que l’heure du départ approche, je me suis demandée comment ils allaient faire cela. Nous étions 250, quand même. Au final, il y avait juste deux gars de l’organisation qui passaient entre les participants et regardaient s’il y avait des lampes sur le vélo. À mille lieues du check-up fait par la RATN !
Soudain, une voix s’est élevée dans les airs à l’aide d’un micro et d’un baffle un peu trop puissant. Le speaker a essayé de nous chauffer, mais personne n’était en mode « ambiance de stade ». À 8h pile, nous étions libérés. J’ai lâché quelques larmes de stress et d’appréhension. « Ça va aller Bapti ! »
Je me suis mise à la fin du pack afin d’éviter d’être dans les cyclistes rapides du début. Mais nous étions tellement nombreux que j’étais quand même entourée de gens. Je n’avais pas l’habitude. Cela a même duré pendant quasiment 100 km. C’était assez étrange pour moi, mais cela me faisait un peu plaisir. Surtout que j’avais des jambes de feu et que j’ai réussi à tenir une bonne moyenne pendant les 80 premiers kilomètres. Hasard du calendrier au taf, cela faisait 10 jours que je n’avais plus pédalé. Mes jambes avaient largement eu le temps de se reposer et je le sentait. Bien sûr, dès que ça montait, c’était une autre histoire. Mais, j’ai vite constaté que je n’étais pas la seule à galérer. Les Danois avec qui j’avais un peu papoté une heure avant n’étaient pas loin devant moi et ceux qui étaient derrières ne me rattrapaient pas si vite que ça. Il y avait donc d’autres humains normaux dans cette aventure ?
La montagne
LE gros challenge de cette North Cape était le passage des Alpes. À part lors des classes de neige et de montages en primaire, je n’étais jamais allé aussi haut. Et encore moins à vélo ! 32km de montée à du 5.9% de moyenne et avec 1878m de D+. Même si j’étais allée chercher quelques cols et montées à l’entrainement, je n’avais rien fait de comparable. Le plus important était de bien garder mon rythme et absolument ne pas suivre quelqu’un de plus rapide. C’est déjà très vrai sur du plat, mais encore plus en montée ! Malgré toute cette théorie dans ma tête, je n’avais aucune idée de comment cela allait se passer. Par précaution, j’avais donc décidé de couper l’ascension en deux et de loger à mi-hauteur. L’ascension avait bien débuté, j’étais à l’aise et en avance sur mon horaire. Il ne faisait pas trop chaud et je savais que plus je montais, plus il faisait meilleur. J’ai dû faire trois pauses mais je n’étais pas au bout de ma vie. Par contre, j’ai eu une grosse déception en arrivant au camping à Étroubles : il était plein ! J’ai essayé de négocier un petit bout de terre pour ma tente mais je n’y suis pas parvenue. Cette nuit-là, j’ai donc fait mon premier bivouac sauvage en montage !
Je n’ai eu aucun problème à démarrer le deuxième jour. Mon départ à 5h43 du matin m’a permis d’éviter le trafic pendant deux bonnes heures. Une fois le tunnel autoroutier dans la montage passé, j’ai vu très peu de voitures, donc c’était encore plus agréable. Ce qui devenait pénible, c’est que je voyais la route loin devant moi. Je la voyais monter de plus en plus haut sans en distinguer le bout. J’essayais de me focaliser sur les magnifiques paysages mais j’avais du mal. Bien qu’au début j’arrivais à rouler quasiment 1h sans devoir m’arrêter, à un moment donné, ce temps s’est réduit à 15 minutes. Je ne l’ai pas réalisé au tout de suite, mais l’altitude commençait à peser sur ma respiration. Je n’étais pas totalement à bout de souffle, mais c’était plus dur de garder le rythme. Finalement, j’ai parcouru les trois derniers kilomètres d’ascension en poussant le vélo. L’arrivée en haut fut magique ! Surtout qu’une cycliste qui entamait la descente m’a lancé un : « félicitations ! » qui me fait encore lâcher quelques larmes aujourd’hui. Je l’ai fait ! J’ai traversé les Alpes à la force de mes jambes ! C’est un truc de dingue !
Après un ravito, un arrêt toilette et la photo obligatoire devant le panneau du col, je me suis lancée dans la descente. Les premiers kilomètres ne sont pas équipés de garde-fou et j’étais terrorisée à l’idée de louper un virage. Les portions de tunnels sont tout aussi horribles, car tout résonne. Je freinais et pourtant je descendais à 45km/h ! J’étais terrifiée et j’avais hâte que cela finisse ! Heureusement, les automobilistes n’étaient pas trop impatients et ne me frôlaient pas de trop. Je pleurais encore, mais là de terreur. Ce qui m’a redonné le sourire, c’est de voir deux personnages en tailles réelle de Cars à Sembrancher. C’était tellement inattendu que j’en ai ri. Peu après mon passage dans cette ville, il a fait subitement TRÈS chaud. Wow, je savais que la température allait remonter, mais là c’était très rapide. Je me suis arrêtée pour enlever toutes les couches de la descente et puis je me suis lancée en direction de Lausanne, le premier checkpoint.